Essai Aprilia Mana
Aprilia attaque un marché très novateur, celui des motos automatiques. Un concept à découvrir qui n'a rien de farfelu
Aprilia attaque un marché très novateur, celui des motos automatiques. Si l'idée peut rebuter les plus traditionalistes des motards et si les préjugés allaient bon train avant de monter en selle, la Mana a réussi à démontrer que ce concept n'a rien de farfelu.
Commençons par la grosse nouveauté, son moteur bicylindre en V à 90° de 850cm3 accouplé à une boîte automatique à 7 rapports. Il ne s'agit pas d'une boîte robotisée mais bien d'une boîte automatique qui propose plusieurs modes de fonctionnement. Un mode manuel qui nécessite de changer soi-même les rapports à la main gauche ou au pied de façon plus classique, et trois modes automatiques : "rain" pour les conditions délicates, touring
pour un usage courant et sport
pour plus de nervosité comme son nom le laisse supposer.
A l'usage, ces trois modes offrent de plus en plus de couple à l'accélération et de plus en plus de frein moteur à la décélération. Le mode pluie est donc idéal sur des pavés mouillés pour prévenir tous risques de dérapages intempestifs et le mode sport pour se faire plaisir quand les routes s'y prêtent. Entre les deux, le mode touring
permet une évolution en souplesse dans le trafic urbain. Cette souplesse se fait remarquer sur les changements d'allure moins vifs qu'en mode sport
mais plus marqués qu'en mode rain
.
Tous ces modes, y compris le manuel, surprennent par les changements de rapports qui font preuve d'une totale discrétion. Monter ou descendre un rapport ne donne aucun à-coup. A la descente, c'est un peu comme si on avait donné le coup de gaz idéal pour optimiser la motricité sans risque de blocage et à l'accélération, comme si on avait passé le rapport au moment le plus propice. D'ailleurs, en mode manuel, la Mana interdit le passage des vitesses lorsque le régime moteur n'est pas dans une plage correcte.
Si avec 76cv annoncés, la Mana ne semble pas être des plus sportives sur le papier, force est de constater qu'une fois en route, son comportement est aussi étonnant qu'efficace. Si elle est capable d'accrocher les 200km/h comme bon nombre de machines dans cette cylindrée, elle en surprendra en revanche plus d'un en mettant le 0 à 100km/h en 4,2 secondes à la portée de tous. En effet, quelle que soit son expérience, il suffit de tourner la poignée et de se laisser propulser pour pouvoir pour prétendre à ce chrono.
La boîte automatique confère à la Mana une belle facilité d'usage en ville : on se concentre uniquement sur son évolution sans se préoccuper du rapport idéal. A l'approche d'un feu rouge, l'Aprilia rétrograde comme on l'aurait fait manuellement et se remet en 1ère pour se tenir prête au prochain départ qui aura tôt fait de se transformer en 400DA... méfiance donc pour son permis.
Au tableau de bord, on note l'absence d'un témoin de neutre
, même lorsque la Mana est en roue libre, un 1
est affiché. Seul point réellement déroutant sur ce système, la Mana passe au point mort en dessous de 30km/h. Evoluer dans une zone 30
n'est donc pas si simple surtout en descente.
Quittons la ville pour les petites routes piémontaises à la sortie de Turin, plus propices à jauger les performances dynamiques du mode sport automatique ou du mode manuel. La surprise la plus évidente est que la machine dispose d'un frein moteur et est même capable de rétrograder seule si on ralentit beaucoup à l'approche d'un virage serré. En mode manuel, on peut se permettre de changer de rapport en plein virage tellement la manoeuvre se fait en finesse avec cette boîte automatique. L'usage du mode manuel se montre rapidement un peu superflu, l'automatique sport faisant très bien son travail. A écouter : le son sur la béquille et quelques virages enchaînés "à bord" .
Le passage d'un mode à l'autre s'effectue au guidon : en appuyant 3 secondes sur le bouton, on passe du manuel à l'automatique, puis en appuyant 1 seconde sur ce même bouton on sélectionne les modes rain
, touring
ou sport
. Si cela peut paraître un peu compliqué, l'usage est très facile passé un petit temps d'adaptation.
Pour profiter de l'efficacité du couple moteur/transmission, la Mana dispose d'une bonne partie cycle et d'un centre de gravité placé bas. Un cadre treillis en acier accueille une fourche inversée de 43mm non réglable et un amortisseur latéral. Le frein avant radial avec ses disques flottants de 320mm et le frein arrière, sont puissants et parfaitement utilisables. Sans être exceptionnelle, la garde au sol est largement suffisante pour se faire plaisir à l'approche des premiers virages de montagne.
C'est bien dans cet usage extra urbain que la Mana surprend. En proposant une machine qui donne ni trop ni trop peu, Aprilia fait de cette moto automatique une machine efficace même sans posséder un bagage technique important. Une moto pour se faire plaisir sans être pilote chevronné et qui saura se faire totalement oublier en ville. On peut bien évidemment tirer les rapports jusqu'à la zone rouge en mode manuel, surtout que des shift ligth
sont présentes au tableau de bord, mais ce n'est pas vraiment efficace et ce n'est pas dans ce mode d'utilisation qu'on se fera le plus plaisir.
A l'arrêt, on appréciera la ligne de la machine qui n'a rien à envier à une moto classique. Seuls, le réservoir sous les selles passager et pilote et le coffre à la place du réservoir, se distinguent de la production conventionnelle en plus du moteur et du système de transmission totalement nouveau et parfaitement visible. Pour l'esthétisme, Aprilia a ajouté quelques caches destinés à embellir le moteur. Son gros phare ovale et ses volumes lui donnent un air serein et une touche unique dans le paysage motocycliste.
Pour le coté pratique, la Mana possède des atouts rares à commencer par le coffre à la place du réservoir qui s'ouvre au guidon et peut accueillir un casque intégral. Faites tout de même un essai avec le vôtre, si la très grande majorité des casques des essayeurs présents rentraient sans problème, quelques uns n'y trouvaient pas une place suffisante. Ce coffre possède un éclairage et une prise 12V pour recharger son téléphone mobile qui dispose d'un logement prévu pour le caler. Il donne aussi accès à la batterie. Enfin, pour stationner en côte un frein à main très simple d'utilisation palie l'impossibilité de passer un rapport.
Le tableau de bord possède un ordinateur qui affiche la température de l'air et du moteur, l'heure, un compteur journalier, le temps de roulage, la vitesse maximale et moyenne, une consommation moyenne et instantanée et un menu pour choisir ses paramètres. En mode manuel, le rapport engagé est affiché en gros et les témoins de régime maxi optimisent les changements de rapports. Concernant la consommation, Aprilia annonce 16 litres pour 280km d'autonomie soit moins de 6 litres aux cents. Sur l'essai (ville et montagne) la moyenne constatée se situait plutôt autour des 8 litres.
La protection est celle d'un roadster, c'est-à-dire quelle est réduite mais Aprilia proposera une bulle haute spécifique à la Mana. L'assise est assez droite et offre un bon compromis pour un usage urbain ou plus sport. La selle du pilote ramène sur l'avant et ses angles se font un peu sentir mais rien de dramatique non plus, globalement c'est très correct. Le passager dispose pour sa part d'une large selle sous laquelle est dissimulé le bouchon de réservoir, de repose-pieds pas trop hauts et d'une grande poignée de maintien.
Bilan essai Aprilia Mana
Au final, Aprilia propose avec la Mana une machine aboutie qui n'a rien d'un prototype ou d'une lubie d'ingénieur. A l'usage, on découvre une machine efficace et d'une facilité déconcertante, une machine qui donne l'impression d'avoir un bon bagage technique tellement la prise en main est évidente.
Pour les grands voyageurs, Aprilia proposera un ensemble de bagagerie avec sacoches et top case et l'ABS courant 2008. Une version 25kw arrivera également pour l'été prochain. L'entretien se fera tous les 10000km et les changements de courroie tous les 20000 (il faudra compter environ 40€ pour celle-ci).
Elle sera disponible en France en novembre 2007 à moins de 9200€ garantie 2 ans pour un kilométrage illimité en coloris bleu, gris ou noir. Le rouge sera proposé l'année prochaine.
Si le concept fonctionne, Aprilia n'exclut pas de le décliner sur des modèles plus routiers et même tout-terrain. Pour le moment, la Mana se présente comme un coup d'essai qui est un coup de maître car même si de petites choses pourraient être améliorées, on prend le guidon d'une moto automatique cohérente et réussie. Oubliez tout ce que vous savez sur les motos et les scooters, la Mana est à essayer absolument tant le concept est nouveau et surtout pertinent.